Le jour cédait discrètement à la nuit, les étoiles apparaissant peu à peu dans un ciel devenu sombre, l’éclat solaire s’en étant allé de bonne grâce un peu plus tôt dans la soirée. Accoudée au rebord de sa fenêtre, une cigarette se consumant légèrement entre ses doigts légers, une jeune fille observait le croissant de lune avec un vague intérêt. Son regard d’un vert émeraude était voilé d’une tristesse coutumière, contrastant avec son teint translucide et ses traits délicats. Ses joues étaient rosies par la morsure du vent, ses cheveux auburn se soulevant au gré de la brise. Une porte claqua alors dans le dos de l’adolescente qui écrasa rapidement la cigarette sur le rebord de la fenêtre avant de la jeter au loin. Elle prit une profonde inspiration et se retourna, faisant face à sa mère qui la contemplait d’un air sévère.

« Ne fais pas l’innocente, Gemma. L’odeur du tabac est perceptible jusqu’au rez-de-chaussée. »

La jeune fille esquissa un sourire plein de candeur.

« Je faisais simplement une expérience sur le tabac moldu, maman. Je ne parviens d’ailleurs toujours pas à comprendre cette fascination qu’ils peuvent avoir à ce sujet. »

Mrs Wakefield haussa un sourcil, suspicieuse. De la famille Wakefield, elle avait toujours été la plus difficile à convaincre ; elle voyait clair dans le jeu de sa fille, dont les mensonges et faux-semblants lui étaient insupportables. Pourtant elle était bien la seule. Car lorsque l’on plongeait dans le regard de Gemma, on n’y percevait qu’ingénuité, fraicheur et authenticité. Un véritable enfant de cœur. Hélas, vous savez ce que l’on dit des apparences. Qu’elles sont souvent trompeuses.

« Tu te paies encore ma tête, c’est bien ça ? »
« Maman! Comment peux-tu croire une chose pareille ? »
« J’en ai assez de tes mensonges… mais bref, nous en reparlerons plus tard. Nous partons chez les Stonem. »
« Passez une bonne soirée ! »

Mrs Wakefield huma une nouvelle fois l’air et fit la moue. Elle finit par quitter la pièce et quelques minutes plus tard, Gemma entendit la voiture moldue de son père quitter le garage. Un nouveau sourire se dessina sur ses lèvres. Enfin seule. Elle jeta un coup d’œil à sa montre : Freddie ne devrait plus tarder. Soudain, un bruit, suivi d’un petit cri et d’un grognement en provenance de l’étage inférieur se fit entendre.

« Tu es vraiment jolie, Gems. »

Assis à coté d’elle sur le sofa d’un vert bouteille, le garçon observait la jeune fille avec une fascination non contenue. La jeune fille soupira, et désigna du doigt la bouteille de whiskey pur feu posée sur la table basse.

« On dirait que tu as un peu abusé du whiskey, Freds. »

Elle lui adressa un sourire auquel il ne répondit pas, trop occupé qu’il était à contempler le regard clair, le teint diaphane, ou les lèvres pleines de la jeune fille. Gemma fit celle qui était légèrement agacée par le comportement du garçon, alors qu’en réalité il en était tout autre. C’était elle, c’était sa façon de s’amuser : voir jusqu’à quel point le sexe opposé pouvait lui résister. Une curiosité teintée d’un certain sadisme qu’on ne pourrait soupçonner en observant la jeune fille alors âgée de seize ans. Freddie prit alors la main de la jeune fille dont il s’approcha brusquement. Son regard brun semblait être hypnotisé et un sourire béat s’installa sur ses lèvres. Gemma attendait, savait qu’il finirait par flancher. Elle n’avait, pour sa part, prit qu’un seul verre de whiskey et était en parfaite possession de ses moyens. Alors qu’elle allait retirer une nouvelle cigarette de son paquet, elle sentit la main du garçon se poser sur sa hanche. Elle relâcha le pauvre paquet et posa son regard sur Freddie. Quelques secondes plus tard, il pressait ses lèvres contre les siennes, ne pouvant s’empêcher de parcourir sa peau lisse de ses doigts, ou de caresser ses cheveux avec une certaine douceur. Elle se laissa emporter par cette vague soudaine, ferma les paupières pour profiter de cet instant délicieusement fugace. Et elle lui promit de nouvelles caresses, toujours plus dangereuses. Toutefois, lorsque la main de l’adolescent glissa sous le tissu de sa robe, la jeune fille se rappela d’une chose essentielle : l’arrêter avant qu’ils n’aillent trop loin. Un sourire furtif se dessina à nouveau sur ses lèvres tandis qu’elle laissait le garçon jouer avec la texture de sa peau. Les choses s’accélérèrent alors lorsque la fièvre atteignit le garçon dont les lèvres s’agitaient toujours sur les siennes. Gems posa alors sa main sur son torse, et détacha son visage du sien.

« Stop, Freds, ça va trop vite. Je ne peux p… »

Mais le garçon ne sembla pas l’écouter, sa main se faisant de plus en plus pressante sous les tissus de vêtements de l’adolescente.

« Freds, arrête, je ne peux définitivement pas. »

Cette fois-ci, elle le repoussa franchement, et se détacha de son étreinte. Le garçon sembla confus.

« Qu’est-ce que tu fais ? Je pensais que tu en avais envie, tu semblais… »
« Non. J’ai changé d’avis, je ne peux pas, ce n’est pas que je ne t’apprécie pas, mais ça s’arrête là. »

Il se releva, la sueur perlant sur ses tempes, un éclat de fureur brillant dans son regard sombre. Humilié, le garçon réajusta ses vêtements et fit demi-tour, marmonnant certains mots dont elle saisit à peine le sens. Il finit par prendre la poudre de Cheminette, et disparut dans l’antre de la cheminée du salon. Un sourire était toujours dessiné sur les lèvres de la jeune fille qui s’allongea doucement sur le sofa, se servant un verre de whiskey et prenant une nouvelle cigarette. Quel idiot, ce Freddie. Pensait-il réellement qu’elle allait céder ? Il devait avoir trop d’estime pour lui-même pour penser qu’il obtiendrait ce qu’il voulait d’elle, là où tous les autres avaient échoué. La jeune fille poussa un soupir de contentement. Les hommes étaient vraiment ses jouets préférés.