Trois ans avant tout cela, la vie était beaucoup plus belle. Je passais du temps avec mes parents. Mes vrais parents, s’entend. Ma mère était une femme très belle, très douce, très drôle. Elle riait sans arrêt, elle aimait tout. C’était une dame tolérante et serviable, généreuse. Elle était parfaite. Je lui ressemble beaucoup, il paraît. J’ai son visage et ses airs, sa malice et son intelligence. C’était un rayon de soleil lors du plus terrible des orages, le vent le plus frais lors de la pire canicule. Par sa présence, le plus tragique des problèmes semblait pouvoir se résoudre. Elle avait quelque chose de magique. Ma mère s’appelait Hope. Espoir, littéralement. Un prénom qui prenait tout son sens quand c’est elle qui le porte.

HOPE « Lux ! Lux ! Viens vite voir ! »
LUXURY « WOW ! »
HOPE « Combien en as-tu vu ? »
LUXURY « Trois d’un coup ! »

Le ciel se zébrait d’une pluie d’étoiles filantes. Il faisait froid, ma mère portait une énorme veste et j’avais sur le dos la grosse couverture qui venait de mon lit. Un beignet à la main, le nez tout rouge, je soufflais et de gros nuages de fumée sortaient joliment de ma bouche. Elle me tenait dans ses bras et elle souriait doucement. On s’écriait lorsque l’on en voyait encore quelques unes. La température était très basse. Pour cause, il faisait nuit, nous étions en Suède. En vacances. Deux mois après, de retour à Londres, jour pour jour, ma mère tombait enceinte. Une petite sœur, un petit frère, qu’importe. Cela me rendait très heureuse. Jouer toute seule, cela passait un temps. Je déteste la solitude. C’était très amusant de voir le ventre de Maman gonfler petit à petit. Maman le sentait souvent bouger, elle en riait. Elle était radieuse. Papa aussi. On était une vraie petite famille. Dans une vraie petite maison. Les seuls invités étaient nos proches amis. C’était convivial, et le travail n’était pas omniprésent. Et puis, comme toutes les histoires, il y a souvent un évènement perturbateur.

Maman était venue me voir et elle me regardait dans les yeux. Son regard était humide, ses lèvres un peu tremblantes et son teint un peu rouge. Elle me caressait doucement la joue et elle m’a, après nombreuses tentatives, appris que le bébé ne viendrait pas. Il y avait eu un problème. Elle se sentait terriblement coupable, cela se voyait sur son visage, se trahissait dans ses mouvements. Elle avait voulu donner la vie à un enfant et lui avait finalement ôté.

LUXURY « Mais, Maman, ce n’est pas ta faute. »

Et elle était partit en courant, détruite. Je n’avais pas pleuré, j’étais abasourdi, tandis que mon père me consolait inutilement. Celle qui avait besoin d’aide, c’était ma mère. C’était Hope. Mais l’espoir est partit quelques jours plus tard, quand on a retrouvé la femme de monsieur Williams sur une route, non loin du quartier dans lequel nous habitions en Angleterre. Sa voiture était tombé dans un petit fossé et avait prit feu.

Après l'enquête qui avait été faite sur ma mère, l'accident avait été déclaré comme un suicide. Les gros titres, l’impression de ne pas avoir été suffisamment à ses côtés. Le manque de sa présence, de son parfum, du bruit de ses pas sur le parquet, ses mains tenant les miennes…
« Pourquoi es-tu partie Maman ? Je ne te suffisais pas ? »

Deux ans après ce tragique accident, Emy est arrivée dans notre routine. Tout le monde se réjouissait que mon père tourne la page et décide de débuter une nouvelle vie. Sauf que je voyais bien qu’elle n’était pas aussi gentille et douce que ma mère. Une chose était claire pour moi : l’argent l’intéressait beaucoup. Elle était un peu plus jeune que mon père, blonde. Le stéréotype de la fille qui se sert des autres pour son compte. Cela faisait désormais un paquet d’années qu’on vivait avec elle. J’avais treize ans et je n’arrivais cependant toujours pas à m’y faire. Je ne m’y ferais jamais. Elle est idiote, simpliste, superficielle, elle n’a aucun humour, elle ne connaît pas l’ironie. Certes, je lui en ai fais baver, mais elle le mérite amplement. C’était elle la victime aux yeux des autres, et j’étais la coupable. Je n’étais pas vraiment un amour avec elle, mais j’étais quand même une fille très gentille. Reagan dit que je suis très courageuse de vouloir leur faire à tous ouvrir les yeux. Mais, me dit-elle, il faut savoir se montrer parfois moins franche. Je manque de tact apparemment. C’est idiot. On dit aussi que je suis maligne, et que j’utilise ce côté rusé pour quelque chose de mauvais (comme par exemple faire de mauvaises farces à Emy). Mais un jour, je n’ai vraiment pas voulu l’effrayer autant.

J’avais treize ans donc et nous étions dans un parc. Il était tôt, nous allions déjeuner avec mon père et Emy. Il est partit à un moment et elle a commencé à me dire qu’il fallait que j’arrête de jouer les petites pestes. Une peste, moi ? Alors qu’est-ce qu’elle est, elle ? J’étais si révoltée par ses paroles, son attitude hypocrite derrière le dos de mon père, que j’ai commencé à l’insulter de toutes mes cordes vocales. Heureusement, le parc était vide, mais ça n’aurait rien changé s’il avait été occupé par une centaine de personnes. Je me fiche de leurs regards effarouchés. Emy était le diable en personne, et en pensant à cela, la vaisselle qui était posée sur le tissu à carreaux rouge se mit à voler vers elle et la brutaliser.

EMY « Arrête ça tout de suite Luxury ! Arrête ! »

J’étais tellement sous le choc que je ne me souviens plus vraiment comment tout ceci s’est arrêté. Quand mon père est revenu, Emy était en train de me poursuivre en essayant de m’attraper, et ce n’était pas pour me chatouiller. On m’a ensuite puni pour une raison que je ne connaissais pas. Je n’avais rien contrôlé. J’avais par la suite réessayé, sans succès. « De toute manière, la magie, ça n’existe pas ! » m’étais-je dit ce jour-là. Le vent devait avoir soufflé très fort, ou en tout cas, il était très probable que ce ne soit absolument pas ma faute. Au final, je n’y ai rapidement plus pensé car le mariage de Emy et de mon père venait d’être déclaré. J’allais devenir officiellement la fille de cette sorcière.

C’était un grand mariage, magnifiquement blanc, avec des fleurs, des invités partout. Il était organisé dans le grand jardin en face de la maison. C’était ridicule comme fête. Les mariages sont ridicules, surtout que la reine de la journée, c’était bien entendu Emy. Elle était aux anges, se vantait d’avoir trouvé un mari si adorable. Lorsqu’on lui parlait de moi, elle faisait comme si elle et moi nous entendions bien, comme si nous étions les meilleures amies du monde. Elle était hypocrite, jalouse et définitivement parfaite dans son rôle de comédienne. Une comédienne hors pair. Elle devrait faire du théâtre.

PRÊTRE « Vous êtes désormais mari, et femme. Vous pouvez… »
LUXURY « Et Maman alors ?! »

J’aurais peut-être du me taire. J’avais quatorze ans, mon oncle m’avait fait un peu boire et j’étais complètement saoule, à ce qu’il paraît. J’ai tout oublié mais Reagan m’a bien tout raconté. Apparemment, je m’étais levé pendant le mariage et m’était mise devant l’autel, avec Emy et mon père. J'avais regardé bien dans les yeux mon père et je lui avais répété sans arrêt ce qu'il faisait de tout ce qui s'était passé avec ma mère, de leurs souvenirs, qu'il les balayait avec cette espèce de blonde hyper oxydée. Même après mon malaise, la fête avait perdu de sa magie et les invités se sentaient mal à l'aise, témoins d'une scène dont ils ne voulaient pas entendre parler. Je ne me vante pas d'avoir tout gâché car mon père m’avait bien demandé de me tenir correctement. Je l’avais déçue, forcément. Déjà que nous ne nous parlions pas beaucoup, cette bêtise détériora encore un peu plus notre relation. Jusqu’à cette lettre.

Je ne recevais pas beaucoup de courrier de ce type, mais j’avais bien rit en la lisant deux ans après cet évènement que j’avais oublié par la suite. Je l’avais jeté, me disant que les gens n’avaient rien d’autre à faire que d’envoyer de si jolie lettre à des personnes qui sauront dès le début que c’est une mauvaise farce. Mais, je ne connaissais pas des gens aussi motivés. J’en reçus d’autre, et je m’étais décidée à en parler à mon père, qui fut surpris. Au final, je fus bien obligé d’y croire. Et bizarrement, mon père était très fier.

Un an après, j’y rentrai, pour le plus grand bonheur d’Emy. Ne plus m’avoir dans les pattes la ravissait totalement. Cependant, j’aime beaucoup lui faire peur avec le bâton qui me sert à lancer de jolies étincelles. Mine de rien, je suis une excellente élève. Pas la meilleure, bien sûr, mais mon niveau est très correct. Je suis très fière d’avoir une ascendance moldue et d’en être venue à pouvoir faire de la magie comme tous les autres sorciers.